3.1 - Nous ne connaissons pas le nombre exact des morts du 26 mars 1962

V - Les victimes-les morts,les blessés,les disparus - 26 mars : les morts et les blessés

3 - Voici venu le temps des assassins

Les tirailleurs, dans cette tragédie, réussissent parfois à faire oublier, que les gardes mobiles, les Rouges, et les CRS, ces spécialistes du maintien de l’ordre, ont tiré eux aussi sur la foule, sans sommation, froidement, on pourrait dire de façon jouissive, « comme pour une chasse aux pieds-noirs », à tous les carrefours, sur les façades, dans les appartements, non pas pendant 5 minutes ou 8 ou 10 mais encore bien longtemps après que 14 heures 50 ait sonné à l’horloge de la Grande Poste .

- Ont-ils compté et savouré le nombre de morts à leur actif ?
- Combien en ont-ils compté ?
- Qui peut prendre connaissance de leurs archives ?
- Archives où, peut-être, on apprendrait qu’il ne s’est rien passé ?

Cependant je dois ajouter une confidence de l’une de mes amies du lycée Fromentin, Geneviève : « Pierre BRÉS, un parent, du côté de mon mari, était colonel de C.R.S., responsable de sécurité pour le secteur d’Alger. Ayant refusé d’obéir aux ordres de faire cesser la manifestation, au besoin par le feu, il a été immédiatement démissionné. Il s’était installé à Dieulefit, dans la Drôme où il peignait des coffres en bois pour s’occuper. Je suis allée à sa recherche, sans succès. Il semble qu’il soit décédé à présent.

Je referai le tour de la France autant que cela sera nécessaire. Mon drame, je le sais, est que « je me suis mise debout » trop tard et pourtant il est encore trop tôt pour ouvrir les archives. Mais ceci se faisant, il sera trop tard pour moi.

J’ai passé des journées entières aux Archives d’Outre-mer d’Aix en Provence, à éplucher toutes sortes de journaux pour l’année 1962, ceux d’Alger et des autres départements. J’ai du m’y prendre à trois fois. La première fois, il est vrai, la collection « La Dépêche d’Algérie » ou bien « Le Journal d’Alger », je ne me souviens plus, avait disparu des archives... C’était une malédiction ? Mais à la deuxième tentative la collection a réapparu, à mon grand soulagement.

J’ai établi une liste des victimes du 26 mars et celle des victimes du blocus et du ratissage impitoyable de Bâb el Oued. J’ai noté sur ces listes tous les détails que j’ai pu recueillir. Je tiens à la disposition de qui le souhaite les photographies numérisées des avis de décès et des avis des célébrations religieuses ainsi que des témoignages et certaines pages des journaux. J’ajoute que j’ai adressé aux sites informatiques et aux associations les listes des victimes en demandant qu’on me signale toute erreur ou manque. Je n’ai à ce jour rien reçu pas même un accusé de réception sauf d’un seul site que je remercie. Je renouvelle ma demande auprès des lecteurs en les priant de me pardonner mon insistance et mon attachement à toutes ces victimes qui sont aussi les témoins de tous ceux dont nous ne pourrons pas faire entendre le nom. Ce sont eux qui prennent soin de leur mémoire à tous.

J’ajoute la liste indissociable des noms de ceux tués pendant l’occupation de Bâb el Oued car invoquer le 26 mars c’est parler aussi ou d’abord de Bâb el Oued.

Sur cette liste de 56 victimes, j’ai laissé des noms (en bleu) dont je n’ai aucune preuve concrète de décès, mais par conviction par rapport aux témoignages et aux listes précédentes. Il faut ajouter à ces 56 noms, 4 victimes non identifiées mais dont nous pouvons être sûres car authentifiées par des témoins. Il faut ajouter enfin 5 victimes portées sur les listes comme non identifiées et non réclamées par un « avis de recherche dans l’intérêt des familles ». Ce qui donne un total de 65 victimes.

Il ne s’agit pas pour moi de courir à une surenchère du nombre des victimes, cette pure horreur n’en a pas besoin mais je suis persuadée que nous sommes loin de la vérité. Aidez-nous. N’hésitez pas, faites-nous connaître ce que vous savez, la plus petite information, le moindre détail. Quarante cinq ans viennent de s’écouler, il nous faut parler, dire et redire sans nous arrêter.

Il faut que cesse leur tourment ou que, peut-être, je cesse moi-même de les tourmenter. Je dois me préparer à l'enfer où je dois retrouver les assassins, mes comptes ne sont pas réglés, tant que je vivrai et pour mille ans encore.



Simone GAUTIER

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L'assassinat de l'Algérie française - In memoriam

 

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