6.1 - Maurice Faivre - Discours habile de Hollande qui remplace la repentance par la soi-disant Vérité de l’Histoire
XII - 50 ans après - Communiqué des Associations
Je fais une re-lecture du discours de Hollande qui surprendra certains
de mes amis.
1. Je trouve ce discours très habile parce qu'il remplace la repentance par la soi-disant Vérité de l'Histoire; cela ne pouvait que faire plaisir à une minorité d'Algériens qui croient à la légende des 45.000 morts de Sétif. Roger Vétillard et le préfet Benmebarek ont rétabli la vérité des faits à ce sujet.
Hollande ne doit pas ignorer d'ailleurs qu'il n'appartient pas à l'État de dire la vérité historique; il sait que les lois mémorielles ont été condamnées par les historiens (Nora, etc…) mais aussi par Badinter. Il appelle d'ailleurs à une lecture objective de l'histoire et demande l'ouverture des archives. Or on sait que celles-ci sont ouvertes en France, mais fermées en Algérie.
Une lecture objective montrera enfin que la violence a été brutale dans les deux camps, depuis la piraterie barbaresque jusqu'à la répression du terrorisme en 1957 et à la guerre civile de 1990, évoquée dans le discours.
2. Ce discours est également habile envers les Français d'Algérie, instituteurs, médecins, architectes, professeurs, artistes, commerçants, agriculteurs, qui avaient su nouer des relations humaines avec le peuple algérien, dont Messali Hadj rappelait "l'amitié et la confiance, et qui sont partis dans le déchirement !"
La langue française est considérée comme un instrument de connaissance et de liberté.
Même les harkis ne sont pas oubliés, ils souhaitent se rendre en Algérie où ils ont des souvenirs et des attaches familiales. Le respect de toutes les mémoires est ainsi une exigence.
3. Sur le plan politique (crise du Sahel, échanges économiques et culturels), le discours reste modéré.
La maîtrise des flux migratoires est souhaitée, avec l'aller-retour des étudiants.
4. Il manque cependant à ce discours un appel à des confrontations historiques équilibrées, en particulier en métropole où les jeunes immigrés subissent la propagande anti-française des média et des professeurs.
L'hommage rendu à Maurice Audin, petit militant communiste dont l'exécution est reconnue comme une erreur par le colonel Godard, doit être confrontée aux violences de la même période (terrorisme aveugle, mutilations corporelles, Melouza, Ali Chekhal).
En 1957, six Européens et cinq soldats français étaient enlevés tous les mois, dont les corps ont disparu à tout jamais.
D'autre part, l'hommage rendu à la France libre aurait dû évoquer l'armée d'Afrique à laquelle des milliers d'Algériens ont participé.
Il faut noter enfin que la modération du discours a été critiquée par les communistes et par madame Audin.
Maurice Faivre, historien des Armées,
le 22 décembre 2012