2.9 - La Grande Poste d'Alger, un joyau d'urbanisme réalisée de 1910 à 1913

III - Histoire et récits - De 1830 à 1954 les réalisations

LA GRANDE POSTE

L’hôtel des postes constitue un repère central de l’urbanisme européen outre-mer. Sa construction, à partir de 1910, marque une étape dans l’expansion de la ville et le renouvellement de son image urbaine. Son style si particulier, défini comme néo-mauresque, est une tentative de réinterprétation de l’architecture traditionnelle. Un véritable palais pour des PTT triomphants.

L’extension des services postaux et télégraphiques est un indicateur de progrès fréquemment repris par les publications officielles du Gouvernement Général de l’Algérie. En effet, l’expansion du réseau des bureaux de poste et du télégraphe suppose la pacification intérieure et un contrôle effectif du territoire ; son développement pose les bases de l’implantation de colons et de l’exploitation économique.

A l’origine la poste dépend du trésor aux armées, puis un décret du 10 mars 1860 en fait un organisme civil ; la colonie compte alors 97 bureaux.

Lorsqu’en 1881, le service des postes et télégraphes est directement rattaché à l’administration de métropole, l’Algérie dispose de 295 bureaux. La progression est constante pendant les décennies suivantes. En 1937, le Rapport sur la marche générale des services des Postes Télégraphes et Téléphone d’Algérie recense 753 bureaux et 1977 boites aux lettres.

Le nombre d’objets transportés dépasse 113 millions ; 240 services automobiles et seulement 14 à cheval et 18 à pied assurent leur acheminement terrestre. Autre indice de modernité, le poids des dépêches avion est en progression constante, à 15.186 kg en 1937 pour les quatre lignes desservies : Algérie-France (94% du total), Algérie-Congo, Oran-Maroc et Alger-Constantine-Bône-Tunis. En 1950, les trois départements algériens sont desservis par 818 bureaux de poste.

A Alger, au lendemain de la conquête, la ville européenne se construit à la périphérie de la Casbah.

Le premier bureau de poste ouvre vers 1845, rue Jean BART. La ville s’étendant à l’ouest de la porte Bab-Azoun, un nouvel Hôtel des postes est érigé dans ce quartier en 1860, déplacé en 1879 à l’angle de la rue de Strasbourg, le bureau prendra ultérieurement ce nom. En cette fin du XIXème siècle, une intervention radicale, de type Haussmannien restructure le tissu urbain existant : des voies sont percées, des rampes relient la ville au port, des bâtiments sont renversés ou transformés.

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De1900 à 1910, 66 nouvelles rues sont créées. A l’image des nombreuses communes de métropole démantelant alors les ouvrages à la Vauban, en 1893 le déclassement définitif par l’armée des anciens remparts d’Alger puis leur démolition ouvrent de nouveaux espaces d’urbanisme, en particulier une extension au sud, l’ouverture du boulevard Laferrière et le développement du quartier d’Isly.

De grands projets structurent et jalonnent cet espace privilégié : la nouvelle préfecture, la Dépêche algérienne, la Grande Poste… Afin de dégager le maximum d’espace, on rase même une chapelle anglicane construite en 1870 sur la partie basse du terrain. La construction du monument dédié aux Postes, Télégraphe est réalisé par les architectes Jules VOINOT et Marius TOUDOIRE, de 1910 à 1913.

 

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La Grande Poste constitue un repère central à la croisée d’axes majeurs de la vie Algéroise, les rues d’Isly et Michelet, le boulevard Laferrière. C’est aussi un joyau de l’urbanisme du moment.

 

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JOYAU DE L’URBANISME

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En ce tournant du XXème siècle, le style néoclassique qui s’imposait depuis la conquête, s’estompe progressivement au profit d’une architecture orientale. A partir de 1905, plusieurs circulaires du gouverneur général JONNART officialisent l’intégration aux projets de bâtiments publics d’éléments architecturaux néo-islamiques. « Les édifices publics de style néo-mauresque constituent les nouveaux repères de l’Alger moderne, et confèrent à cette cité la dimension patrimoniale qui lui manquait jusqu’alors.

Même si certains détracteurs qualifient les édifices néo-mauresque de pastiches, ils n’en continuent pas moins à fixer l’image du paysage urbain algérois. Le langage néo-mauresque est une démarche à tendance humaniste, une tentative de récupération et de réinterprétation des valeurs du patrimoine architectural et urbain traditionnel dans une forte volonté d’arabisation du cadre bâti.

Pour autant, ces édifices ne sont pas la copie d’aucun monument arabe existant. Les architectes parent de décors islamisant des structures Art nouveau, qui font largement appel aux charpentes métalliques et dégagent de vastes espaces indispensables à la destination contemporaine de constructions telles que gares, théâtres, hôtels de ville ou bureaux de poste, fonctions nouvelles sans équivalent dans le patrimoine traditionnel de l’Afrique du nord.

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La façade de la Grande Poste, bâtiment de prestige, allie la symétrie de tradition européenne classique aux attributs de l’Orient : vaste coupole à nervures d’inspiration byzantine, faux minarets, arcs outrepassés brisés… Couronnant l’édifice, la galerie à colonnes jumelées et balustrades métalliques et soulignée sur toute sa longueur de bandeaux de faïence verte portant, en arabe, le nom des principales villes d’Algérie.

Des escaliers de marbre conduisent au parvis et au porche décoré de trois arceaux ouvrant sur trois voûtes brodées d’arabesques et d’épigraphie et reposant sur des colonnes aux chapiteaux de marbre ciselé. Suivant la formule hispano-mauresque, le décor est polygonal, floral et épigraphique. L’épigraphie est somptueuse. Sous le porche, autour des trois portes d’entrée en bois précieux « Le télégraphe et le téléphone l’ont créé » est inscrit sur le petit et le grand arceau.

La même inscription se retrouve à l’intérieur et dans des cartouches polychromes « la hauteur de la construction qui a embelli l’œuvre, avait été choisie par le Gouverneur Général JONNART. Autour de ces cartouches, en caractères andalous imitant une broderie est écrit »Il n’y a de puissant que Dieu », « Le pouvoir éternel lui appartient » et au-dessus en hautes lettres claires « Dieu est vainqueur ».

Cette dernière inscription se renouvelle en haut du mur et sur le pourtour du hall. Le décor lui-même a un sens religieux. Les lignes de la polygonie évoquent l’idée divine ; le cyprès celui de la délivrance de l’homme et l’étoile un symbole d’adoration… qui ressemble à une mosquée.

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