12.5 - Professeur Paul LEBON

VI - Les témoignages - Les médecins - les infirmiers - les pompiers

Témoignage du Professeur Paul LEBON
recueilli par Francine Dessaigne
"Au moment de la fusillade du 26 mars 1962, je dirigeais à Mustapha le service d'ORL."

En ce qui concerne le corps médical, nous avons collabé toute une série d'observations dont je ne sais ce qu'elles sont devenues. Le grand public (dans la mesure où il peut y être intéressé- ce qui m'étonnerait !...) devrait avoir accès aux archives. Une nouvelle loi vient de prescrire les délais de trente ans pour en ajouter soixante-dix de plus (cent ans ... la péremption de la prétendue histoire!)

Toujours est-il que lors du 26 mars j'étais chez un ami, le docteur A..., chirurgien-dentiste, en face des Facultés. Voyant de l'armée prendre position dans son immeuble de même qu'aux alentours, je me rendis alors dans mon service, subodorant ce qui allait se passer, mais pas avec une telle ampleur, détermination et cruauté.

Et c'est à Mustapha que nous vîmes arriver les victimes et les blessés.

Outre le docteur Massonnat,[1] camarade d'internat, je me souviens fort bien d'avoir vu parmi les cadavres  deux petites filles de huit ou dix ans, en robes rouges, que j'avais opérées quelque temps auparavant à la clinique des Orangers, leurs parents faisant partie des CFA, dont j'étais également médecin spécialiste. Aujourd'hui, je ne me souviens plus de leur nom.

En ce qui concerne les blessés, j'ai eu dans mon service quatre blessés graves : deux sapeurs-pompiers en tenue dont un fut opéré de blessures cervico-faciales avec extraction impossible d'une balle logée dans le rachis cervical - l'autre de blessures identiques avec ablation d'une balle logée dans le sinus maxillaire. Sapeurs-pompiers qui nous expliquèrent avoir été mitraillés après qu'on les eut laissé passer. Deux autres blessés graves avec plaies de la tête, du cou, lésions jugulaires et carotidiennes qui s'en sont tirés.

Et le jeune Rigal – alors externe en ORL et qui, atteint d'une balle au genou, fut traité dans le service du professeur Goinard (réduction d'une fracture avec arthrite du genou, immobilisation par plâtre sous drainage continu). Rigal auquel je rendis plusieurs visites.

Ces observations furent adjointes à de nombreuses autres émanant des différents services-collabées. Je ne sais ce qu'elles sont devenues.

Les témoignages dès lors parus sont un fait indéniable, mais ceux fournis dans ces observations médicales corroborent par les interrogatoires des blessés ce que tout le monde sait mais renforcent les témoignages par leur rigueur scientifique les observations n'ayant pu être inventées (ou imaginées). Voilà ce que je puis vous dire.

Le docteur Maurin, O.R.L. était à l'époque chef de clinique dans mon service et c'est ensemble le plus souvent que nous avons opéré.

Les souvenirs ne s'estompent pas trop devant de tels drames vécus, encore que bien souvent les documents officiels (les nôtres) aient pratiquement totalement disparu.

Commentaire de Francine Dessaigne :

Deux médecins, le professeur Boulard et le professeur Lebon fournissent des témoignages concordants.

Tous deux ont bien vu deux fillettes dont on ne trouve plus aucune trace… Il nous a été impossible d'obtenir une quelconque information à ce sujet.

Cette énigme est à rapprocher de celle que nous pose la mort du bébé évoqué plus loin par Madame Suzanne Caze Avelin. [2]

A ce point de notre étude, nous pouvons ajouter à la liste des morts figurant dans "Le Livre Interdit", avec une quasi-certitude, cinq victimes supplémentaires :

- une femme européenne non identifiée
- un bébé européen non identifié
- une fillette d'environ 10 ans non identifiée
- une fillette d'environ 8 ans non identifiée
- Madame Grégori Faustine décédée des suites de ses blessures (La Dépêche)

[1] : Voir l'article : VI - 5.25 Grande Poste témoignages des familles des amis ...
[2] :
Voir l'article : V - 3.2 Liste des victimes assassinées

 

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